Par : 

Michèle Herblin,

traiteur-chef à domicile

Hélèna Loureiro

« J’ai la chance de vivre ma passion en faisant le meilleur métier au monde alors, j’en profite pour vendre mon Portugal ! »

C’est comme ça que la chef Helena Loureiro vous accueille, avec le sourire et cette conviction vissée au coeur que la cuisine est le meilleur agent de liaison entre les Hommes. Quand vous entrez dans l’un des ses deux restaurants de Montréal, le Portus Calle et le Helena, l’ambiance vous emporte en voyage. Pas seulement les odeurs ou la lecture du menu…, tout vous entoure de la joie de vivre portugaise, les couleurs, la chaleur de l’accueil, l’activité de la cuisine à aire ouverte et les rires qui fusent , le partage et la convivialité qui se dégagent même des tables , la musique… Sa cuisine, Helena l’a voulue comme ça, chaleureuse, simple et familiale.

Dès le premier contact, on se sent bien dans les restaurants d’Helena, comme chez soi. « Je suis née dans une cuisine, dit-elle, et c’est là que je me sens vivre ! » Très jeune, la chef sait ce qu’elle veut faire. À l’âge de 11 ans, elle travaillait avec sa mère, sa grand-mère et sa tante dans le restaurant familial qui existe encore. De cette éducation où le travail est une valeur fondamentale, elle gardera la résistance et la détermination qui aujourd’hui la guident dans son entreprise. « Nous autres les femmes, nous devons travailler et travailler encore pour arriver, toujours plus qu’un homme ! » Fataliste ? Pas du tout… Helena est une battante qui a appris que la journée n’est finie que lorsque le dernier client a quitté le restaurant et que cette vie de service est source de bonheur. Elle est arrivée au Québec en 1988 avec son expérience culinaire et sa formation à l’Institut d’hôtellerie de Lisbonne, mais surtout avec sa culture. « Le soleil je le mets dans l’assiette, » affirme-t-elle en vantant les produits qu’elle met en vedette dans ses menus : les poissons, les fruits de mer et les légumes riches de saveurs et de couleurs. En perpétuant la tradition culinaire de son pays, Helena avoue qu’elle s’est installée sur le créneau d’une cuisine simple, authentique et savoureuse que les clients avaient appris à connaitre avec Carlos Ferreira « qui a ouvert les portes  du Portugal ici à Montréal, » ajoute-t-elle admirative.

Partager les expériences et tout superviser…

Après avoir suivi un cours de perfectionnement à l’ITHQ « pour mieux comprendre les attentes des gens d’ici », le rêve d’avoir son propre restaurant devient réalité. Helena ouvre le Portus Calle dans le quartier portugais en mars 2003 (10 ans déjà !). Elle fait le marché elle-même, rencontre les fournisseurs, parle avec les petits producteurs, choisi ses poissons, sélectionne les produits du Québec qu’elle va adapter à ses recettes portugaises. Selon la chef, le respect des clients passe par la qualité des produits et le respect de soi-même passe par le plaisir de faire plaisir. Car, pour Helena, bien cuisiner, c’est bien écouter, permettre à chacun de s’exprimer. Dans sa cuisine qu’elle qualifie de « bistrot », le produit aussi s’exprime car il est mis en valeur. Pas de friture, de beaux légumes et de l’huile d’olive, rien n’est caché, tout est visible, tout est reconnaissable. C’est vrai que tout est visible chez Helena et elle en parle volontiers, une approche singulière qui pousse la simplicité jusqu’à la transparence. «À part cuisiner, dit-elle, ce que j’apprécie le plus c’est parler avec les clients, aller les saluer en salle, leur expliquer mes recettes et l’origine d’un produit… parler du Portugal et de leurs dernières vacances ! ». Le lien est essentiel pour Helena, et sa cuisine prend sens dans la vie de tous les jours. 

Avec ses équipes (72 personnes sur les deux restaurants) elle assume son rôle de « cheftaine du camion ». Pour elle, être une femme au volant n’est pas plus complexe que pour un homme. Le respect qui lui revient est incontestablement à la hauteur du respect qu’elle a pour son équipe. « Je suis exigeante et rigoureuse mais quand je peux les gâter, je le fais ! et ça n’empêche pas que la Bible (entendez la règle) soit la même pour tout le monde. » Helena aime former son personnel, tester des produits ou des recettes nouvelles avec eux, partager les idées ou encore laisser les jeunes exprimer leur créativité. Mais au final, la décision lui revient, tout comme l’envoi de l’assiette à laquelle on peut souvent la voir ajouter la petite touche finale. « Il y a des choses qui marchent et d’autres que je ne laisserai jamais faire, » conclue-t-elle avec fermeté. Helena exprime volontiers sa fierté de certaines réussites, collectives ou personnelles, mais elle n’accorde aux échecs que le rôle de « mauvaises expériences » celles qui font réfléchir et avancer encore plus vite. En chef d’équipe positive, Helena ne regrette jamais rien, elle analyse, mais elle ne se laisse jamais paralyser par une déception. Elle avance ! « Une des clés de la réussite, confit-elle, c’est certainement de ne jamais regarder en arrière, de bien analyser et de croire en ce qu’on fait… et puis… travailler, travailler, travailler ! » 

Avec ses partenaires, c’est la complémentarité qui prime. La chef a vite compris que, dans les entreprises comme en cuisine, le secret de la réussite c’est la complémentarité des associés. Chacun son rôle. Difficile d’être en cuisine et en même temps sur les réseaux sociaux ou sur l’ordinateur à gérer les comptes… en revanche, pour une plus « La gestion se fait à chaque instant. à chaque plat qui sort, je sais combien ça coûte très précisément. Chez nous rien ne se perd et tout est frais. » grande efficacité, les échanges entre associés sont permanents et tous les éléments de décision circulent entre eux. « La gestion se fait à chaque instant, à chaque plat qui sort, je sais combien ça coûte très précisément. Chez nous rien ne se perd et tout est frais. » Une belle leçon de gestion réactive, proche des exigences de ce métier fait de tant d’aléas et d’ajustements… Une belle leçon de confiance aussi dans cette équipe serrée qui mesure sa réussite au taux de fidélité des clients et au remplissage exceptionnel des restaurants. « Ce n’est pas difficile de gérer quand les salles sont pleines. Ça l’est plus quand la fréquentation baisse ! » Alors le secret se trouve où ? Modestement Helena pense que c’est parce que tous ensemble ils offrent à leurs clients naturel, sourire et chaleur humaine, parce que leur amour du client est tel qu’il se transmet dans les assiettes…
 

Petits messages à transmettre aux jeunes filles de la relève…

Rien ne semble impossible à la Chef Helena Loureiro, c’est là ce qu’elle voudrait transmettre aux jeunes, et particulièrement aux filles. Croire en soi, ne tromper personne, être authentique, vendre ce que nous sommes, notre personnalité, notre histoire, nos expériences… vendre nos produits pour ce qu’ils sont, sans triche ni superflu… trouver le plaisir là où il est, dans le moindre sourire de satisfaction, dans le plus petit régal, dans la plus infime reconnaissance de ce que nous donnons… « Ce métier de cuisinier est une passion et il est fait de beaucoup de plaisirs, des petits et des grands… Il faut apprendre à les apprécier pour pouvoir les transmettre à notre tour aux clients. »

Helena est fière de son chemin, fière que ses enfants, élevés en vivant au rythme du restaurant, aient compris pourquoi leur maman était heureuse de travailler, qu’ils aient partagé ses réussites et ses valeurs. Donner à manger aux gens n’est certainement pas l’essentiel de ce métier. Le partage, la transmission de nos valeurs, de nos racines, de notre culture, tous inscrits dans notre style de cuisine, valent beaucoup plus que l’argent reçu pour la vente du repas. Et, bien sur, comme tout ne peut pas être permis, il faut donc veiller à ce qu’il n’y ait pas de dérapage, gérer, former et se former, essayer et recommencer, ne jamais désespérer, s’accrocher… et en tout temps, penser qu’on est capable !

Un grand merci Helena !

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